«Du Bénin vient toujours quelque chose de nouveau », aurait pu dire Aristote s’il avait connu l’existence de la terre du vodoun. Au pays des alternances pacifiques, celle qui s’annonce ne devrait pas déroger à la règle : l’ancien Dahomey est décidément une démocratie vivace et novatrice, un laboratoire politique à ciel ouvert.
Cinq ans après avoir écrasé sous les bombes le régime psychopathe de Mouammar Kadhafi, les stratèges de l’Otan s’apprêtent à remettre le couvert pour « finir le travail » – à moins que ce ne soit pour réparer leur coupable imprévoyance.
À chaque début d’année, ça ne rate pas : les astrologues, médiums et devins (plusieurs termes pour désigner le même phénomène : la charlatanerie) livrent leur pronostic pour les douze mois à venir. Ensuite on les oublie.
Deux événements ont eu lieu presque simultanément, les 15 et 16 janvier. Le premier à Ouagadougou, au cœur de l’Afrique, le second à Vienne, au centre de l’Europe.
C ‘était inéluctable. À Kasserine comme à Sidi Bouzid ou à Gafsa, le feu couvait sous la braise de la révolution. Il fallait être sourd et aveugle pour ne pas discerner la véritable bombe à retardement que constitue le centre défavorisé du pays, foyer du soulèvement de 2011 et véritable ghetto social laissé en déshérence depuis cinq ans.
C’est à sa manière, d’un tweet ironique et rageur, que le président rwandais a répondu à la « profonde déception » manifestée par le département d’État américain, après l’annonce, le 31 décembre, de sa très probable candidature à un nouveau mandat : « Il y a pas mal de choses très décevantes qui se produisent de par le monde. Nous, nous souhaitons porter notre fardeau et ne pas être celui des autres. Je vous promets que nous n’avons pas l’intention de décevoir quiconque, à commencer par nous-mêmes. »
Qu’attend-on des politiciens, de la démocratie, des bulletins de vote et des lois de la bonne gouvernance électorale quand on vit à Birao (Centrafrique) ou à Gouré (Niger) ?
La tradition en a fait un devoir. Mais il m’est agréable de vous souhaiter, chères lectrices et chers lecteurs de Ce que je crois, une bonne et heureuse année 2016.
Après une année 2015 marquée, sur le plan électoral et démocratique, par le sursaut nigérian et l’heureux dénouement de la « révolution » burkinabè, que nous réserve 2016 ?
Commençons par un lieu commun : la Chine a changé. Celle de 2015 n’a rien à voir avec celle de 1980. Mais justement, c’est en essayant de se souvenir de ce qu’elle fut qu’on appréhendera vraiment la nature du changement.
Cela fait dix ans qu’Idriss Déby a ajouté Itno, le nom de son grand-père, à son patronyme, et pourtant, à N’Djamena comme ailleurs, chacun continue de l’appeler Déby, comme s’il n’avait pas changé depuis le temps des rébellions et des rezzous mécanisés dans les sables du Borkou-Ennedi-Tibesti, le mythique BET des méharistes français.
Décerner le titre d’Africain (ou d’Africaine) de l’année qui s’achève s’apparente à la recherche parfois désespérée des jurés du prix Nobel : il y a des années avec et des années sans.
Il s’appelle Moïse. Je suppose qu’il est chrétien. Même si ce n’est pas le cas, ce prénom biblique est une preuve, pour ses parents, qu’il est bien civilisé.
S’il n’est pas à l’abri des maladies infectieuses et autres épidémies qui frappent le continent, du paludisme à Ebola, le Sénégal semble préservé des maux politiques endémiques qui, aux yeux du monde, semblent confiner l’Afrique au rang de continent maudit.
Sidi Bouzid, dans le centre de la Tunisie, 17 décembre 2010. Un jeune marchand ambulant, Mohamed Bouazizi, éreinté par la précarité et les brimades policières, s’immole par le feu.
Dix ans et dix mois de solitude pour un palais où poussent désormais les herbes folles. Lomé II, à la périphérie de la capitale togolaise, ne s’est jamais remis de la disparition du grand baobab de Pya.
Les chasseurs africains sont montrés du doigt : ils feraient courir à toute la communauté le risque d’une épidémie d’Ebola. La consommation de viande de brousse est déconseillée dans toute l’Afrique, quand elle n’est pas interdite et sanctionnée. Sans aucun fondement scientifique.
« Je suis très heureux de la victoire de mon ami Roch. On est très liés, et nos destins, bizarrement, se sont recoupés. On a été Premiers ministres en même temps, présidents de l’Assemblée nationale en même temps. Et voici qu’il rejoint la fratrie… »
Les apparences peuvent être trompeuses. Quoi de commun en effet, de prime abord, entre Monaco, enclave de riches, très riches, et l’Afrique, qui, bien que lancée sur la voie de l’émergence depuis bientôt dix ans, doit encore parcourir un long chemin pour espérer sortir ses populations de la pauvreté.
Fin novembre, quelque part en Afrique subsaharienne. Confidences d’un chef d’État du continent, fin connaisseur de la France et de ses acteurs politiques, après les attentats de Paris : « François Hollande n’a pas réagi comme il aurait dû. Il n’a utilisé que le bâton, le discours martial, soulignant sa volonté d’éradiquer le terrorisme par tous les moyens, policiers et militaires, sur le territoire national comme en Syrie et en Irak. Il a oublié la carotte, comme, par exemple, un vrai plan Marshall dans les banlieues et les poches de pauvreté pour assécher ce terreau du terrorisme qu’est l’« apartheid territorial, social et ethnique » décrit par son Premier ministre peu après les attentats des 7 et 9 janvier. Tant qu’on ne se posera pas la question, à Paris comme ailleurs, de savoir pourquoi les internationales jihadistes recrutent aussi facilement, partout, des jeunes prêts à mourir kalach à la main ou une ceinture d’explosifs autour du torse, on ne réglera rien. »
Ce n’est pas l’ami Glez, notre dessinateur favori, qui me contredira : l’ennui avec les hommes politiques, c’est qu’on croit faire leur caricature alors que, bien souvent, on ne fait que leur portrait.
À cette même place, la semaine dernière, j’ai fait le constat suivant : « Aucun pays n’a osé engager de troupes au sol contre « l’État islamique » et aucun ne veut courir le risque de le faire.
Un bain de jouvence… Les 21 et 22 octobre, le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) a eu droit aux fastes d’une visite d’État en France – une première depuis l’indépendance.
Renversant ! C’est le moins que je puisse dire après la volée de flèches qu’a reçue le président français, François Hollande, courant octobre, après sa phrase sur le référendum constitutionnel au Congo-Brazzaville.
Déjà particulièrement complexe, l’échiquier politique congolais est aujourd’hui devenu illisible. Il fut un temps, pas si lointain, où tout était simple, ou presque.
Pneus enflammés et cris de colère contre gaz lacrymogènes et balles en caoutchouc. Sur les campus, devant le Parlement, le palais du gouvernement ou – symbole fort s’il en est – le siège du Congrès national africain (ANC), des milliers d’étudiants sud-africains hurlent leur ras-le-bol à la face de leurs aînés, qu’ils accusent de trahison.
Nous avons tous cru que le temps de la terreur kaki n’était plus qu’un lointain souvenir sur l’ensemble du continent. Avions-nous été naïfs de croire que l’être humain peut être autre chose qu’une simple brute épaisse ?